Introduction
Ce rapport en français est complémentaire de celui du Dr Jo Thompson. Je m’attacherai à utiliser ma connaissance de la région et des gens qui l’habitent, pour apporter des éclaircissements sur certains détails de la mission. Le rapport ainsi que l’importante documentation photographique concernant cette mission seront accessibles très prochainement sur le site de notre association, à l’adresse suivante: http://www.nouvellesapproches.org
Situation générale
A notre descente d’avion, nous avons trouvé la capitale du cuivre pimpante et en pleine effervescence, toute à la préparation de l’installation de son nouveau parlement dans le bâtiment du Théâtre de la Ville. La présence du Président de la République et de tout son Gouvernement en ville, pouvait se deviner aux nombreux contrôles de sécurité, qui se faisaient en toute courtoisie. En règle générale la Mission d’aide aux Parcs Nationaux du Congo fut accueillie avec bienveillance par toutes les autorités.
Le Gouverneur de la Province du Katanga nous fit savoir sa satisfaction et nous encouragea dans notre mission. Son directeur de cabinet intervint personnellement auprès de la direction de la douane (OFIDA) et auprès des services de l’Agence Nationale de Renseignement (ANR) afin de nous faciliter les démarches. Des autorisations pour circuler dans la Province nous furent ainsi délivrées par l’ANR. Quant à l’OFIDA, la direction provinciale nous autorisa à retirer les marchandises en provenance de Belgique et destinées aux Parcs Nationaux, sans payer de droits d’entrée et ce, malgré que la procédure d’obtention de l’exonération des droits de douane, introduite par l’ICCN auprès du Ministre des Finances, n’avait pas encore abouti.
En règle générale nos déplacements dans la province se déroulèrent sans incidents majeurs, si ce n’est l’état des routes et les inévitables tracasseries et excès de zèle de certains agents au plus bas de la hiérarchie, lors des nombreux contrôles de sécurité. La prise de contact avec l’équipe de l’ICCN se fit le jour de notre arrivée, au cercle Makutano, où Mr Malembe nous offrit un drink de bienvenue.
La première réunion de travail fut programmée pour le lendemain matin au bureau de liaison de Lubumbashi. Bureau de liaison de Lubumbashi: Le bureau de liaison de Lubumbashi se compose de deux pièces dans une annexe du bâtiment du cadastre. Le mobilier est rudimentaire, composé de trois bureaux, deux tables, une armoire, une étagère et quelques chaises et fauteuils. Le matériel de bureau se compose de vieilles machines à écrire et d’une phonie assurant la liaison avec les Parcs et la Direction Générale à Kinshasa. L’état général des locaux est sombre et nécessite des travaux de réfection des toitures, de la maçonnerie et de la peinture. L’effectif est de cinq agents dirigés par Mr Mbayo.
Le rôle du bureau de Lubumbashi est d’assurer la liaison entre les différentes stations de l’ICCN au Katanga et de faciliter tout le travail administratif qui doit se faire dans le chef-lieu de la province. Outre son rôle d’appui au personnel de l’ICCN en mission à Lubumbashi, le bureau se doit de promouvoir l’image de l’ICCN au niveau de la province.
Constatations
Nous avons déploré l’absence totale de promotion de l’ICCN à Lubumbashi à tel point que la plupart des gens étaient incapables de nous dire s’il existait un bureau de l’ICCN en ville, et personne n’a pu nous indiquer son emplacement.
Interrogé sur les activités du bureau dans le cadre d’une information au public, le responsable nous a répondu que rien n’était fait faute de moyens.
Notre intervention
Notre intervention en faveur du bureau de Lubumbashi s’est résumée à la fourniture de 4 vélos pour les agents et au paiement d’une provision dans un dispensaire, pour les soins à venir des agents, et ce, jusqu’à épuisement de la dite provision.
Nos recommandations
Nommer à ce poste un responsable ayant les compétences requises en matière de communication avec le public. Ce responsable doit être à même de promouvoir l’image de l’ICCN par l’organisation de conférences, de journées portes ouvertes, d’information au public, d’un service de bibliothèque, tout en aidant les agents de l’ICCN de passage à Lubumbashi, dans leurs démarches administratives diverses.
Nos projets
Constitution d’une bibliothèque avec l’aide du Musée de Tervuren. Fourniture de cartes postales offertes par l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique. La vente de ces cartes pouvant engendrer des recettes au niveau du bureau de Lubumbashi.Amélioration des locaux et du matériel.
Parc National de Kundelungu
Notre premier voyage en brousse nous amena à Kundelungu.
Notre intervention
Le matériel attendu de Bruxelles ayant été retenu à Kinshasa, et notre séjour au Congo étant très court, nous avons décidé, afin de ne pas perdre de temps, de partir avec uniquement les vélos et les colis déjà disponibles chez notre correspondant de Lubumbashi. Nous avons donc délivré, lors de notre passage à Katwe, 30 vélos, des rations pour les patrouilles, ainsi que des habits et jouets pour enfants et un peu de matériel scolaire. Nous avons remis plus tard les tentes, sacs à dos, imperméables, bottes, médicaments, cartes postales et publications scientifiques, lors d’une cérémonie dans le bureau de liaison de Lubumbashi, en présence du Conservateur Mr Nkulu et du PDG Mr Malembe Mbo. Un vélo supplémentaire fut offert au chef Kienge afin de faciliter les déplacements de son infirmier dans la région.
Constatation
Les bâtiments de la station sont dans un état à peu près identique à celui constaté par la Mission d’Huart en 1991. Le gîte, légèrement à l’écart de la station, est aujourd’hui occupé par les militaires chargés de garder la piste d’aviation. Le dispensaire sert d’habitation, l’infirmier ayant déserté son poste. Pour le reste, la station affiche un état semblable à celui qui fut toujours le sien.
La galerie forestière autour de la source qui alimente la station en eau, a connu des coupes de bois assez inquiétantes. Par endroits, la galerie est carrément déboisée sur toute sa largeur en vue de pratiquer des cultures. Si le déboisement continue, on risque d’observer un abaissement du niveau de la nappe phréatique, avec comme conséquence, la nécessité de creuser beaucoup plus profond pour trouver l’eau nécessaire à la vie de la station. L’aménagement de cette source est d’ailleurs à envisager, l’eau ne parvenant plus à remplir le réservoir et à sortir par les tuyaux d’évacuation, une érosion ayant entraîné le passage de l’eau sous la dalle en béton.
En ce qui concerne le personnel, nous avons trouvé un effectif d’une trentaine de personnes à la station. Cela semble correspondre au nombre d’agents annoncé dans les états de besoin. Nous avons été surpris de constater que la plupart des agents en poste, et plus particulièrement ceux qui affichaient de beaux uniformes, ne parlent pas les dialectes locaux mais uniquement le Kiswahili, ceci tendant à prouver que ces agents sont issus de milieux urbains. Ces agents affichent un niveau de vie bien supérieur à celui que l’on s’attend à leur connaître au vu de leur maigre salaire. Nous avons constaté à regret que de nombreux collets étaient tendus le long des sentiers tout autour de la station, ne laissant aucun doute sur l’identité des poseurs.
Le conservateur nous a avoué ne pas avoir parcouru son Parc une seule fois depuis les deux ans qu’il est en poste, suite à de nombreux problèmes administratifs le retenant à Lubumbashi, et au manque de véhicule. Lors de nos déplacements dans le Parc, nous avons réussi à atteindre la Lofoï, malgré une piste par endroits totalement effacée, et encombrée de nombreux arbres. Grâce à l’intervention d’une équipe de gardes, le pont sur la Fibila avait été réparé, ce qui nous permit d’atteindre en voiture, le site de la Lofoï. Pendant ce voyage de 160 kilomètres, nous n’avons aperçu qu’un bubale et quelques petites antilopes. Durant nos déplacements à pied pour aller visiter le site de la chute, nous avons pu constater que les sentiers étaient nombreux et très fréquentés, ce qui dénote une totale liberté de déplacement des populations de la vallée sur le plateau. Notre visite à la Lutshipuka ne nous permit pas de voir plus d’animaux, et on peut raisonnablement penser que tout le Parc est dans cet état. Nous avions interrogé le personnel quant à la situation des guépards qui étaient connus du PNKun, et qui semblaient éteints depuis le début des années 1990.
Dans une initiative malheureuse pour essayer de nous faire plaisir, on nous affirma le lendemain, qu’un garde avait aperçu un guépard la veille à 8 km de la station. Lorsque nous avons demandé à être conduit à l’endroit où le guépard avait été aperçu, on nous répondit que le garde ne se souvenait plus très bien. Devant ma stupéfaction, la mémoire lui revint et il fut décidé de se rendre sur les lieux. Quelques gardes nous gratifièrent alors d’un spectacle désolant, faisant semblant de suivre des traces qui n’existaient pas. Cette attitude, outre le fait qu’elle nuit gravement au climat de confiance qui doit régner entre l’ICCN et ses partenaires, atteste du manque total de professionnalisme du staff en place à Kundelungu.
Recommandations
Bien que cela ne soit pas de notre compétence, il nous semble que tout le personnel en place à Katwe aurait besoin d’un sérieux complément de formation. Il en résulterait sans doute une meilleure gestion des brûlis, des patrouilles efficaces, une surveillance accrue, une présence dans le Parc qui entraverait les activités illicites de braconnage qui se font en toute tranquillité. Cela permettrait d’arrêter le déboisement inconsidéré des forêts galeries et ferait disparaître les pièges qui fleurissent tout autour de la station.
Nous pensons également que la piste d’aviation doit être entretenue, car la laisser à l’abandon signifie des frais énormes le jour où il sera décidé de la réhabiliter. Quant aux fantomatiques guépards, des preuves irréfutables de leur existence devraient être produites avant de contester leur extinction.
Nos projets
A ce stade de déliquescence du Parc, il ne nous est pas possible de faire plus que ce qui a été fait au cours de cette mission. Le PNKun doit reprendre sa situation en main, et si des résultats sont obtenus, grâce entre autre à l’aide que nous avons apportée, il est possible que nous révisions notre jugement. Mais si la situation demeure en l’état, il ne nous sera pas possible de dépenser les fonds qui nous sont confiés en faveur de ce parc. Les seuls pôles d’intérêt restant en ce parc, sont les sites des spectaculaires chutes de la Lofoi et autres Lutshipuka ou Masanza, qui ne nécessitent pas de protection.
La chance de ce parc réside dans le fait que le plateau est relativement inhabitable à cause du vent et des températures peu élevées, et du sol sablonneux qui ne se prête pas à l’agriculture. Il existe donc peu de tendance de la part des populations environnantes à l’envahissement. Il convient peut-être de mettre ce Parc en « veilleuse » en attendant des jours meilleurs?
Conclusion générale
La « DRC Parks relief Mission » a atteint tous les objectifs qui avaient été fixés pour le voyage d’Août 2000. Nous avons pu travailler en collaboration avec les plus hautes autorités du pays en matière d’environnement et de conservation de la nature. Nous nous sommes rendus dans toutes les stations des deux parcs katangais (Upemba & Kundelungu) et avons rencontré tous les conservateurs et responsables. Le matériel a été livré directement dans les sites, et des cérémonies officielles de remise du matériel ont chaque fois été organisées devant tous les gardes. L’accueil réservé à ce matériel fut enthousiaste, et des promesses de gestion saine nous furent faites, avec mise en place d’un contrôle a posteriori de la bonne utilisation du matériel.
A ce jour, les fonds alloués aux Parcs Upemba et Kundelungu n’ont pas encore entièrement été dépensés, mais au vu des besoins, ils le seront certainement. Les responsables de Ape Alliance, seront informés dans le détail de l’utilisation des fonds par les coordinateurs du Lukuru Wildlife Research Project et de Nouvelles Approches a.s.b.l.
On peut affirmer en toute modestie, que notre mission d’aide aux Parcs Katangais, outre l’apport matériel salutaire qu’elle a apporté sur le terrain, a insufflé un regain de courage dans les rangs de l’ICCN, qui sait maintenant que le monde ne l’a pas abandonné.
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Source: BAK asbl